Doudoune synthétique 320g

Je lorgnais depuis un bon moment sur les doudounes. J'avais toujours utilisé une polaire, mais pour aller affronter des températures négatives tout en restant léger, c'est un passage obligé. Mais avec chaud et léger rime très souvent beaucoup d'argent.

Du coup, c'était une bonne occasion de me lancer dans la [basse] couture. Projet ambitieux, certes, mais il faut bien essayer un jour. Alors j'ai commandé tissu, duvet synthétique et patron, réquisitionné la vieille machine à coudre de la belle-famille et commencé mes bricoles.

Mes critères de choix étaient : moins de 350g, moins de 80€ et bonne protection en statique par températures légèrement négatives (équivalent à 80g de duvet). Par facilité de réalisation je suis parti sur de la ouate synthétique: presque trois fois moins chaude que du duvet 850 cuin à poids égal, mais plus résistante à l'humidité et aux lavages.

J'ai commandé tout le matériel nécessaire chez Extrem Textil et Thru Hiker. Un tableau récapitule les coûts en fin de page. Le tissu intérieur est du Momentum 90 Taffeta, pesé à environ 37g/m² (noir), et le tissu extérieur du Momentum 90 Micro Ripstop, environ 34g/m² (steel grey). Le Momentum est bien déperlant (DWR) et coupe-vent. La doudoune sera garnie de Primaloft Sport 60 pour les manches et 133 pour tout le reste, y compris la capuche. Le choix de garnir aussi la capuche en 133 est motivé par l'utilisation de la doudoune pour dormir par des températures largement négatives (-15°C). La tête représentant plus de la moitié des émissions de chaleur de notre corps, mieux vaut bien la protéger.

Il n'y a pas grand intérêt à décrire en détail une par une les étapes de la réalisation. Par contre, je vais essayer de détailler quelques erreurs à ne pas faire et tout ce que le patron ne décrit pas pour le novice que je suis!

Etape 1: découpe du patron, tests avec du tissu lambda

Avant de s'attaquer au tissu dont la livraison a duré 6 semaines, j'ai fait un modèle pour vérifier que la taille choisie est la bonne, et ajuster éventuellement la longueur des manches et du buste. J'ai donné quelques centimètres en plus aux manches. La taille peut être ajustée pendant la réalisation (plus facile de recouper que de rajouter...).

La capuche ne me plaisait pas du tout, trop haute, mal formée et ne remontant pas assez sous le nez. Alors j'ai pris ma veste de pluie préférée et ai créé un patron à partir de sa capuche. Le résultat m'a plu.

Je me suis au final retrouvé avec un second patron fait avec des journaux et divers prospectus.

Etape 2: découpe du tissu

Pas de grande difficulté là, si ce n'est qu'il faut jouer à Tetris pour essayer d'économiser du tissu. Pour la première doudoune, les pièces du dos et du ventre on été découpées par symétrie avec un pli. Pour la deuxième doudoune, je n'ai pas repris cette technique, car il est plus fastidieux d'épingler le tissu pour qu'il ne bouge pas que de dessiner et découper la pièce entière.

Attention par contre à la découpe du Primaloft. Là, il ne faut pas être radin et découper 3 bons centimètres de rab tout autour. Je ne l'avais pas fait par souci d'économie pour la première doudoune, vous allez voir juste après pourquoi je l'ai regretté.

A l'issu de la découpe du tissu j'avais :

Doudoune 1 : 67g de M90 T, 60g de M90 R , 280g de Primaloft
Doudoune 2 : 60g de M90T , 55g de M90 R , 230g de Primaloft

Etape 3 : couture du Primaloft au tissu intérieur

Coudre une épaisseur de 2.5cm de milliers de mini fils dont la cohésion est assurée par je ne sais quelle magie, c'est la galère. Lorsque le Primaloft est face à la table, ça ne pose pas de souci. Mais côté aiguille/pied, c'est le bordel: les fils se prennent dans le pied. Pour ça, il faut bien appuyer avec le pouce sur le devant du pied, de manière à applatir les fibres, et laisser en place le tissu sur lequel est livré le Primaloft le plus longtemps possible.

Le Primaloft Sport 133 est relativement stable et ne nécessite une couture traversante (quilting) que tous les 60cm. Par contre le Primaloft Sport 60 est instable, relativement élastique et se détrame facilement (si on peut qualifier de trame un tel bordel). Il nécessite un quilting tous les 15 cm.

Coudre de la ouate sur un tissu très fin n'est pas évident: au fur et à mesure que l'on coud, la ouate s'étend et on se retrouve en fin de longueur avec 1 ou 2 cm de tissu en plus que ce que l'on avait épinglé. Si par malheur on arrive sur un autre couture, dans un coin, on se retrouve avec un gros pli.

J'ai trouvé deux petites astuces pour palier ce problème. - Ne pas coudre les deux longueurs avant de quilter. D'abord faire un côté, puis les coutures traversantes, et enfin finir l'autre côté.

Lorsqu'on ferme une zone et que l'on arrive dans un coin, tirer le tissu vers l'intérieur de la zone dans la diagonale pour éviter un bourrelet.

C'est là aussi qu'on regrette vite d'avoir coupé le Primaloft trop juste. Durant la couture, le Primaloft bouge, et il suffit de quelques centimètres pour se retrouver avec des parties du tissu sans Primaloft. Ce qui entraîne un essai de rattrapage après, un truc foireux plus loin, et avec un peu de chance un résultat juste satisfaisant à la fin.

Enfin, je conseille de coudre avec la fine couche de tissu sur laquelle est livré le Primaloft et de ne la découper qu'au dernier moment, juste avant le dernier assemblage des tissus intérieurs et extérieurs. Cela empêche les fibres d'entraver le pied et préserve la ouate des manipulations successives de la doudoune.

Etape 4: assemblage des pièces intérieures

Avant d'assembler les pièces, il faut rajouter un petit morceau de tissu pour la fermeture éclair. Je n'ai pas trop compris à quoi ça servait sur la première doudoune, et au final il y a des plis à ce niveau car le tissu est trop tendu. Cette pièce permet d'éviter ça. On peut utiliser du scotch pour coudre droit.

Plier de chaque côté et sur-coudre. Couper enfin au milieu, là où viendra se loger le zip (pas trop profond pour l'instant, il est toujours possible de couper plus après).

Pas de grosse difficulté pour l'assemblage si le Primaloft a été bien mis en place et coupé au ras des coutures. On accole face à face les "bons" côtés, deux ou trois épingles pour pas que ça ne bouge trop, et on coud.

La capuche est rendue délicate par sa courbe! Pas grand chose à dire, la mieux réussie a été la quatrième (après 1 doudoune et 2 modèles), donc ça vient avec l'expérience.

Une langue découpée dans les chûtes permettra d'accueillir le cordon de serrage de la capuche.

Glisser la capuche à l'intérieur de la veste pour l'assembler au col. Attention à ne pas faire comme moi, sur la photo, et bien mettre les "bons" côtés face à face. Ça vous évitera d'avoir à découdre...

Finir enfin par les côtés en ajustant si besoin la taille après quelques essayages.

Etape 5 : assemblage des pièces extérieures

Pas de Primaloft à manipuler, ça va plus vite là. Comme pour la partie intérieure, coudre une pièce supplémentaire pour le zip. Pour les finitions, il est dit dans la notice de faire une sur-couture pour les manches et la capuche. Pour avoir une couture bien plate et sans pli, bien appuyer avec le pouce pour plaquer la marge de couture contre la grille d'entraînement. J'avais utilisé quelques bouts de scotchs au début, mais ce n'est pas nécessaire.

Pour les poignets, j'ai utilisé la technique décrite par Thru-Hiker. Couper un élastique à la taille du poignet en laissant un surplus pour pouvoir le tendre. Coudre pour bloquer un côté, tendre, faire l'ourlet et coudre sur la longueur, deux fois. Bloquer enfin l'autre côté, et couper l'élastique à la taille de manche. A deux (un qui tend l'élastique, un qui faire l'ourlet et coud) c'est beaucoup plus facile.

Une fois toutes les pièces extérieures assemblées, le poignet se ferme et donne un résultat convenable.

Avant d'assembler l'intérieur et l'extérieur, il reste à coudre le zip à la partie extérieure.

Etape 6 : assemblage des deux parties

On peut ensuite glisser la partie intérieure dans la partie extérieure (face contre face) et les joindre par la capuche. Essayage puis couture du zip à la partie intérieure pour solidariser le tout. On utilise la partie supplémentaire pour faire un ourlet, ce qui donne un résultat propre.

Attention à ne pas casser l'aiguille en passant sur les dents du zip en cousant un arrêt.

Je ne savais pas trop comment assembler les manches, mais c'est loin d'être du travail de pro, alors un petit ourlet bâti et une couture en aveugle, en tendant bien l'élastique, ça fera l'affaire. 

Reste encore à fermer en bas. Il faut faire un passage, sur la moitié avant de la doudoune, pour le cordon de serrage à la taille. Un ourlet avec un petit oeillet convient bien.

On passe l'élastique et on le coud aux extrémités, après avoir laissé sortir une boucle de l'oeillet, où viendra se glisser un tanka. Une couture pour fermer l'arrière, qui est plus long pour redescendre sur les fesses, et la doudoune est finie!

Deux jours avant le départ pour le Maroc, il était temps d'arriver au bout du travail.

Quelques chiffres 

Avec un pantalon léger mais coupe-vent, un t-shirt et la doudoune, il est agréable de rester dehors par 6°C. Nous n'avons pas eu l'occasion de tester plus frais.

La doudoune M contient au final 180g de Primaloft pour un poids total de 320g, la doudoune S contient 170g de Primaloft pour un poids total de 300g. Leur compressibilité est impressionnante, j'arrive à tenir ma doudoune compressée dans la main (ça dépasse un peu quand même). Environ 0.7L je dirais.

En terme de coût, le tout m'est revenu à : 

  • 65€ chez Extrem Textil (dont 5€ de FDP) pour 2.5m de Primaloft 133, 2m de Primaloft 60, le patron, le fil, le zip et autres accessoires 
  • 90€ chez Thru-Hiker (dont 13€ de FDP) pour 4m de M90T et 4m de de M90MR 
  • 15€ de frais de douane

Donc un total de 170€ pour les deux doudounes, soit 85€ l'unité. Il me reste cependant au moins 20% de tissu (Momentum et Primaloft), de quoi se lancer dans un autre projet...

Bon courage à ceux chez lesquels j'ai suscité l'envie de se lancer!

Mise à jour 2015 : on fait maintenant beaucoup plus léger, n'est-ce pas ?